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20/11/2010

C'est un bon alibi qu'une tragédie. On dit : « Voyez ce pauvre vieillard ! Peut-il faire à la fois cinq actes, et cela, et cela encore ?

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http://www.deezer.com/listen-7020231 : mi sono innamorato di te , Volti qui utilisait l'italien dans ses lettres enflammées pour Marie-Louise allait bien au-delà de cette simple et naïve expression d'amour ... Il était encore loin de l'appeler "Maman Denis" !!

 

A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

 

20 novembre 1766

 

Divins anges, vous vous y attendiez bien, voici des corrections que je vous supplie de faire porter sur le manuscrit i.

 

Maman Denis, et un des acteurs de notre petit théâtre de Ferney, fou du tripot, et difficile ii, disent qu'il n'y a plus rien à faire, que tout dépendra du jeu des comédiens, qu'ils doivent jouer Les Scythes comme ils ont joué Le Philosophe sans le savoir iii, et que Les Scythes doivent faire le plus grand effet, si les acteurs ne jouent ni froidement ni à contresens.

 

Maman Denis et mon vieux comédien de Ferney assurent qu'il n'y a pas un seul rôle dans la pièce qui ne puisse faire valoir son homme. Le contraste qui anime la pièce d'un bout à l'autre doit servir la déclamation, et prête beaucoup au jeu muet, aux attitudes théâtrales, à toutes les expressions d'un tableau vivant. Voyez, mes anges, ce que vous en pensez . C'est vous qui êtes les juges souverains.

 

Je tiens qu'il faut donner cette pièce sur le champ, et en voici la raison. Il n'y a point d'ouvrage nouveau sur des matières très délicates qu'on ne m'impute. Les livres de cette espèce pleuvent de tous côtés. Je serai infailliblement la victime de la calomnie si je ne prouve l'alibi. C'est un bon alibi qu'une tragédie. On dit : « Voyez ce pauvre vieillard ! Peut-il faire à la fois cinq actes, et cela, et cela encore ? » Les honnêtes gens alors crient à l'imposture.

 

Je vous supplie, ô anges bienfaiteurs, de montrer la lettre ci-jointe à M. le duc de Praslin ou lui en dire la substance. Il sera très utile qu'il ordonne à un de ses secrétaires ou premiers commis d'encourager fortement M. du Clairon à découvrir quel est le polisson qui a envoyé de Paris aux empoisonneurs de Hollande son venin contre toute la cour, contre les ministres, et contre le roi même, et qui fait passer sa drogue sous mon nom iv.

 

Comme j'en étais là, je reçois votre lettre du 13. Je pense absolument comme M. le duc de Praslin , qu'il ne faut pas imprimer les lettres de Jean-Jacques tirées du dépôt v, avec l'authenticité d'une permission du ministère. Mais il faudra bien les imprimer et rectifier les dates, si Jean-Jacques ose nier son écriture, ce qu'il fera sans doute en se prévalant de la méprise sur ces dates, on peut avoir eu ces lettre originales des héritiers de M. du Theil vi . Elles ne sont point censées devoir être dans le dépôt des Affaires étrangères, parce qu'elles ne regardent point les affaires d'État, et que ce n'est qu'une discussion entre un maître et un valet menacé de coups de bâton.

 

La lettre sous mon nom au docteur Pansophe est probablement de l'abbé Coyer vi. Si je l'avais écrite, je serais bien loin de la désavouer, elle est digne des Provinciales.

 

Mais prenez garde que je mentirais si ayant eu le bonheur d'écrire cette lettre charmante à Jean-Jacques je disais à M. Hume que je n'ai pas écrit à Jean-Jacques depuis 7 ans.

 

Cela est très vrai. Je ne mens point, ma lettre à M. Hume ne contient que des faits incontestables, et des faits qu'il m'était important d'éclaircir. Ce malheureux m'avait calomnié, et il a fallu me justifier vii.

 

Voici la destination que je fais selon vos ordres des rôles de l'académie royale du Théâtre-Français.

 

Ô anges, je n'ai jamais tant été au bout de vos ailes.

 

V.

 

N.B.- Il y a pourtant dans la Lettre au docteur Pansophe, des longueurs et des répétitions, elle est certainement de l'abbé Coyer.

 

N.B.- Voulez-vous mettre mon gros neveu l'abbé Mignot du secret ? »

 

abbé mignot neveu volt portrait.jpg

 

iIl a envoyé le manuscrit des Scythes la veille.

http://www.voltaire-integral.com/Html/06/04SCYTHE.htm

 

ii V* y jouait le rôle de Sozame, vieillard exilé dans les montagnes.

 

iii Pièce de Sedaine créée le 2 décembre 1765 à la Comédie Française.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Philosophe_sans_le_savoir

http://www.archive.org/stream/lephilosophesan01sedagoog#p...

 

 

 

iv Ce sont les Lettres de M. de Voltaire à ses amis du Parnasse,recueil de lettres « altérées » et accompagnées de « notes encore plus outrageantes » ; cf. lettre aux d'Argental du 6 octobre ; la lettre jointe était destinée à du Clairon.

http://books.google.fr/books?id=ZDEVAAAAQAAJ&printsec...

 

 

v Lettres adressées par Rousseau à du Theil quand il était à Venise en 1744 auprès de Montaigu ; cf. lettre du 7 novembre : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/11/07/a...

Elles furent publiées dans les Notes sur la lettre de M. de Voltaire à M. Hume en novembre 1766.

http://www.voltaire-integral.com/Html/26/04_Notes_Hume.html

http://www.editions-coda.fr/pid87-EXPOSE-SUCCINT-DE-LA-CO...

 

 

vi On l'attribue actuellement à V* qui demandera par ailleurs à Bordes de s'en reconnaitre l'auteur ; cf. lettre du 15 décembre.

 

vii Cf. lettre du 28 octobre à Damilaville.

http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/10/27/j...

 

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